History of the Peloponnesian War

Thucydides

Thucydides. Histoire de la Guerre du Péloponnése, Vol. 1-2. Zévort, Marie Charles, translator. Paris: Charpentier, 1852.

IV. Les Athéniens abordèrent peu après. Les généraux, voyant l’état des choses, signifièrent leurs ordres aux Mytiléniens, et, sur leur refus de s’y conformer, commencèrent les hostilités. Les Mytiléniens n’étaient pas préparés ; car ils avaient été surpris par la nécessité de faire la guerre. Cependant ils firent une sorte de démonstration et sortirent un peu en avant du port, comme pour combattre ; mais ensuite, poursuivis par les vaisseaux athéniens, ils se hâtèrent d’ouvrir une négociation avec les généraux ennemis, dans le but d'éloigner la flotte pour le moment, s'il se pouvait, à des conditions acceptables. Les généraux athéniens accueillirent ces ouvertures ; car eux-mêmes craignaient de ne pas être en mesure de faire la guerre à toute l’Ile de Lesbos. Une convention fut conclue : des députés mytiléniens, au nombre desquels était un de ceux qui avaient dénoncé les préparatifs, et qui déjà se repentait, partirent pour Athènes, afin d'obtenir le rappel de la flotte en assurant que de leur côté ils n’entreprendraient rien qui fût contraire à l’alliance. En même temps ils envoyèrent une autre députation aux Lacédémoniens ; car ils comptaient peu sur le succès de celle qui devait agir auprès des Athéniens. Les députés, montés sur une trirème, échappèrent à la surveillance de la flotte athénienne mouillée à Malée[*](Il ne peut pas être question ici du promontoire de Malée, situé , au contraire , au sud de la ville ; ce promontoire est à une telle distance qu’une flotte n’aurait pu, de là, surveiller Mytilène. Il s’agit probablement d’un mouillage, au nord de Mytilène, auquel la presqu’ile de Malée aura donné son nom.), au

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nord de la ville, et arrivèrent à Lacédémone après une pénible navigation : là ils avisèrent aux moyens d’obtenir quelque secours.

V. Ceux qui avaient été envoyés à Athènes étant revenus sans avoir rien obtenu, les Mytiléniens prirent les armes de concert avec tout le reste de l’ile, Méthymne exceptée. Cette dernière ville fournit des se- cours aux Athéniens, ainsi qu’Imbros, Lemnos et un petit nombre d'autres alliés. Les Mytiléniens firent une sortie générale contre le camp des Athéniens, et engagèrent un combat dans lequel ils n'eurent pas le désavantage. Cependant ils n’osèrent ni bivouaquer sur le champ de bataille, ni compter sur eux-mêmes ; ils rentrèrent donc dans la place, et à partir de ce moment ils restèrent dans l'inaction, décidés à ne se hasarder qu'avec d’autres préparatifs et s’il leur arrivait quelque secours du Péloponnèse. En effet, Méléas de Lacédémone et Hemnéondas deThèbes venaient d'arriver auprès d’eux : envoy és avant la défection, mais n'ayant pu devancer l’arrivée de la flotte athénienne, ils pénétrèrent secrètement dans le port sur une trirème, après le combat, et conseillèrent d’envoyer avec eux des députés sur une autre trirème ; ce qui fut exécuté.

VI. Les Athéniens, fortement encouragés par l'inaction des Mytiléniens, appelèrent à eux des alliés ; et ceux-ci, voyant les Mytiléniens se défendre mollement, se hâtèrent d'arriver. Ils mouillèrent au sud de Mytilène, formèrent deux camps fortifiés, de part et d’autre de la place, et établirent des croisières devant les deux

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ports. La mer se trouva ainsi fermée aux assiégés. Du côté de la terre, au contraire, les Mytiléniens et les Lesbiens venus à leur secours étaient maîtres de tout le pays. Les Athéniens n’occupaient que peu d’espace autour de leurs camps ; Malée ne leur servait guère que de mouillage pour leur flotte, et de marché. Tel était l’état des hostilités à Mytilène.