History of the Peloponnesian War

Thucydides

Thucydides. Histoire de la Guerre du Péloponnése, Vol. 1-2. Zévort, Marie Charles, translator. Paris: Charpentier, 1852.

VI. Ensuite, le moment venu, il les conduisit de nouveau au combat. Nicias et les Athéniens sentaient [*](1 Le combat s’était engagé dans l’espace compris entre les remparts de la ville, le mur transversal des Syracusains et le double mur des Athéniens, prés du temple de la Fortune.)

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bien, de leur côté, que, même sans être provoqués au combat par les Syracusains, il y avait nécessité pour eux de s’opposer à la construction du mur élevé près de leurs travaux, — car déjà le mur des Syracusains atteignait presque l’extrémité de leur retranchement, et s’il le dépassait, il devenait indifférent pour eux de vaincre dans des combats sans cesse renouvelés, ou de ne pas combattre du tout[*](Parce que, malgré leurs victoires, les communications de Syracuse avec l’extérieur resteraient libres, au moyen de cette muraille.). — Ils sortirent donc à la rencontre des Syracusains. Gylippos porta ses hoplites plus en avant des murs que la première fois et en vint aux mains. La cavalerie et les gens de trait étaient rangés sur le flanc des Athéniens dans une plaine ouverte, par delà l’extrémité des fortifications des deux armées. Dans l’action, la cavalerie fondit sur l’aile gauche des Athéniens qui lui était opposée et la mit en déroute; le reste de l’armée, entraîné dans ce mouvement, fut vaincu par les Syracusains et rejeté en désordre dans ses retranchements. La nuit suivante, les Syracusains eurent le temps de prolonger leur muraille jusqu’aux travaux des Athéniens et au delà; de sorte qu’ils n’avaient plus aucun obstacle à craindre de leur part, et leur ôtaient, même vainqueurs, tout moyen de les enfermer désormais.

VII. Les vaisseaux de Corinthe, d’Ambracie et de Leucade, restés en arrière au nombre de douze, entrèrent ensuite dans le port, sans avoir été aperçus par la croisière athénienne. Ils étaient commandés par Érasinidès de Corinthe. Ces troupes travaillèrent de concert avec les Syracusains à terminer les retranche- [*](1 Parce que, malgré leurs victoires, les communications de Syracuse avec l’extérieur resteraient libres, au moyen de cette muraille.)

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ments jusqu’au mur transversal[*](Les retranchements dont il est question ici devaient longer les hauteurs d’Épipolæ et venir rejoindre le mur transversal qui s’étendait jusqu’à l’enceinte de Syracuse. Les mots μέχρι τοῦ ἐγκαρσίου τείχους, qui ont fort embarrassé les interprètes, pourraient aussi bien se traduire s à partir du mur transversal; ils indiquent que le mur en question, au lieu de suivre la direction primitive de la muraille transversale, ce qui l’eût porté trop au nord vers les hauteurs, venait s’embrancher sur lui pour suivre la plaine vers le nord-est.). Gylippos parcourut le reste de la Sicile, pour y lever des troupes de terre et de mer et rallier celles des villes qui montraient peu de zèle ou qui étaient restées jusque-là tout à fait en dehors de la guerre. D’autres députés, Syracusains et Corinthiens, furent envovés à Lacédémone et à Corinthe pour demander qu’on fit passer de nouvelles forces par quelque voie que ce fût, sur des transports, sur des barques, ou de toute autre façon, parce que les Athéniens réclamaient aussi des renforts. Les Syracusains équipaient leur flotte et l’exerçaient à la mer, décidés à porter aussi leurs efforts de ce côté; ils n'apportaient pas moins d’ardeur à tout le reste.

VIII. Nicias le savait, et voyait chaque jour ajouter à la force des ennemis et aux difficultés de sa propre situation. Il envoyait de son côté des messages à Athènes; bien des fois déjà il en avait fait passer dans d’autres circonstances pour tenir au courant de chaque événement; mais il les multiplia alors, persuadé qu’il était dans une position critique, et que, si on ne se hâtait soit de rappeler l’armée, soit de lui envoyer des renforts considérables, il n’y avait aucune chance de salut. Comme il craignait que ses messagers ne fissent pas connaître le véritable état des choses, soit faute de savoir s’exprimer, soit par défaut de mémoire, ou même pour [*](1 Les retranchements dont il est question ici devaient longer les hauteurs d’Épipolæ et venir rejoindre le mur transversal qui s’étendait jusqu’à l’enceinte de Syracuse. Les mots μέχρι τοῦ ἐγκαρσίου τείχους, qui ont fort embarrassé les interprètes, pourraient aussi bien se traduire s à partir du mur transversal; ils indiquent que le mur en question, au lieu de suivre la direction primitive de la muraille transversale, ce qui l’eût porté trop au nord vers les hauteurs, venait s’embrancher sur lui pour suivre la plaine vers le nord-est.)

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faire quelque rapport agréable à la multitude, il écrivit une lettre; il crut que c’était le meilleur moyen de faire connaître exactement sa pensée aux Athéniens, sans qu’elle fût dénaturée par le messager, et de les mettre en état de délibérer sur la situation réelle des affaires. Les envoyés partirent, chargés de cette lettre et de tout ce qu’ils devaient dire eux-mêmes; quant à lui, il se borna à la garde de son camp, évitant désormais de chercher volontairement le danger[*](Je lis έχουσίων κινδύνων [ά] πεμελεΐτο. Il suffit du changement d’une seule lettre pour donner un sens raisonnable à la phrase, que tous les commentateurs ont été obligés d’expliquer contrairement au texte reçu έπεμελεΐτο.).

IX. A la fin du même été, Évétion, général athénien, fit avec Perdiccas une expédition contre Amphipolis, à la tête d’un corps nombreux de Thraces; mais, n’ayant pu la prendre, il suivit avec les trirèmes les contours du Strymon, alla stationner à Himéréon, et de là bloqua la ville; l’été finit.

X. L’hiver suivant les messagers deNicias étant arrivés à Athènes, rapportèrent tout ce qui leur avait été dit de vive voix, répondirent aux questions qu’on leur fit, et remirent la lettre. Le secrétaire de la ville en donna lecture aux Athéniens; en voici le contenu :