History of the Peloponnesian War
Thucydides
Thucydides. Histoire de la Guerre du Péloponnése, Vol. 1-2. Zévort, Marie Charles, translator. Paris: Charpentier, 1852.
CXXI. « Quant à nous, c’est pour repousser une injustice et venger de justes griefs que nous réveillons aujourd’hui la guerre. Les Athéniens châtiés, nous déposerons à temps les armes.
« Nous avons bien des chances de vaincre : d’abord nous avons pour nous le nombre et l’expérience des combats ; ensuite nous avons tous également l’habitude de l’obéissance. Quant à la marine, qui fait leur force, nous en formerons une avec les ressources particulières de chaque ville et les trésors déposés à Delphes et à Olympie[*](Il ne peut être question ici de piller les temples ; les Corinthiens proposaient d’emprunter, comme cela se pratiquait dans les nécessités pressantes, les trésors de Delphes et d’Olympie.). Au moyen d’un emprunt nous serons en mesure de débaucher, par une solde plus élevée, leurs matelots étrangers[*](Ces matelots étaient levés dans toutes les parties de la Grèce, même dans le Péloponnèse.) ; car la puissance athé- nienne est plutôt mercenaire que nationale ; la nôtre, fondée sur nos personnes bien plus que sur nos richesses, a moins à craindre à cet égard. Une seule victoire navale nous les livre vraisemblablement. S’ils résistent, nous aurons plus de temps pour nous exercer à la marine, et, une fois égaux par la science, nous l'emporterons certainement par le courage : car les
CXXII. « Nous avons encore d’autres moyens à leur opposer dans cette guerre : la défection de leurs alliés, dont la première conséquence est de tarir les revenus, source de leur puissance ; la construction de forteresses sur leur territoire[*](Les Lacëdémonlcns fortifièrent, en effet, Décélie, pour en faire la base de leurs opérations contre l’Attique (Thucy. i, 142).) , et tant d’autres ressources qu’on ne saurait prévoir actuellement. Car la guerre ne suit pas, tant s’en faut, une marche réglée à l’avance ; c’est elle-même qui, le plus souvent, combine ses moyens au gré des circonstances. Y rester maître de soi est le gage le plus sûr du succès ; s’y laisser emporter, c’est s’exposer à plus de revers.
« Songeons, en outre, que si chacun de nous n’avait à contester que sur des limites et contre des ennemis égaux en forces, on pourrait se résigner ; mais aujourd’hui les Athéniens, en état de lutter contre nous tous réunis, sont bien plus forts encore contre chaque ville isolément. Si donc nous ne nous réunissons tous ensemble, si peuples et villes ne se confédèrent dans une
CXXIII. « Mais à quoi bon critiquer longuement le passé, si ce n’est en vue des intérêts actuels ! C’est en faveur de l’avenir qu’il faut venir en aide au présent, sans épargner la peine ; car s’élever à la vertu par le travail est un exemple que nous ont légué nos pères. Si maintenant vous l’emportez un peu sur eux pur la richesse et la puissance, ne renoncez point, pour cela, à ces moeurs héréditaires ; car il n’est pas juste que ce qui a été acquis par la pauvreté soit perdu par l’opulence. Marchez donc, pleins d’une confiance que bien des motifs autorisent ; l’oracle s’est prononcé et le dieu
CXXIV. « Ainsi tout vous convie à faire la guerre : nous vous y exhortons en commun ; et il est certain qu’elle entre dans les intérêts des villes et des particuliers. Ne tardez donc pas à secourir les Potidéates, c’est-à-dire des Doriens assiégés par des loniens (c’était le contraire autrefois), et sauvez en même temps la liberté de tous les autres Grecs ; car si nous abandonnons ceux qui sont aujourd’hui attaqués, si l’on sait, de plus, que nous nous sommes réunis sans oser les secourir, il n’est pas possible que les autres n’éprouvent pas bientôt le même sort. Considérez, généreux alliés, que nous en sommes venus à la dernière extrémité, et que le meilleur parti est celui que nous conseillons. Décrétez donc la guerre, sans vous inquiéter de ce qu’elle peut avoir de terrible pour le moment, sans songer à autre chose qu’aux longs jours de paix qui en résulteront ; car c’est par la guerre surtout qu’on affermit la paix ; et il n’y a pas la même sécurité à fuir la guerre par amour du repos.
« Voyez cette ville qui, au milieu de la Grèce, s’est érigée en tyran : elle nous menace tous également ; déjà elle commande aux uns ; elle médite l’assujettissement des autres ; marchons donc pour la réduire, et, par là, assurons et l’affranchissement des Grecs
Ainsi parlèrent les Corinthiens.
CXXV. Lorsque tous eurent donné leur avis, les Lacédémoniens firent voter sucessivement tous les alliés présents, les délégués des petites villes comme ceux des grandes. La majorité se prononça pour la guerre. Cette décision prise, il n’y avait pas moyen d’agir surle-champ, aucune disposition n’étant faite : on arrêta donc que chacun ferait ses préparatifs en toute hâte ; moins d’une année fut employée à prendre les mesures nécessaires, jusqu’au jour où l’Attique fat envahie et la guerre ouvertement déclarée.
CXXVI. Pendant ce temps ils envoyèrent des députés porter leurs griefs aux Athéniens, afin d’avoir, autant que possible, un prétexte spécieux de faire la guerre, si leurs plaintes n'étaient pas écoutées. Dans une première ambassade, les Lacédémoniens ordonnèrent aux Athéniens d’expier le sacrilège commis contre la déesse[*](Minerve.) ; voici quel était ce sacrilège :
Un Athénien, nommé Cylon, vainqueur aux jeux olympiques, riche et d’une famille ancienne, avait épousé la fille de Théagène de Mégare, alors tyran de cette ville. Cylon ayant consulté l’oracle de Delphes, le dieu lui répondit d’occuper l’acropole d’Athènes, le jour de la plus grande fête de Jupiter. Il prit avec lui des forces que lui fournit Théagène, ainsi que ses amis gagnés au complot, et, quand vinrent les fêtes olym- piques du Péloponnèse[*](D’après le scoliaste de Thucydide, on célébrait aussi des fêtes olympiques en Macédoine et à Athènes.), il s’empara de l’acropole. Son but était la tyrannie. Il crut que c’était là la plus
CXXVII. Les Lacédémoniens invitèrent donc les Athéniens à rejeter loin d’eux cette souillure ; leur but, sans doute, était d’abord de venger la majesté des dieux ; mais ils savaient aussi que Périclès, fils de Xanthippe, tenait par sa mère à cette race sacrilège, et ils espé- raient , Périclès tombé, mener plus facilement à bien leurs affaires avec les Athéniens. Cependant ils comptaient moins encore le faire chasser, que soulever contre lui l’opinion publique, en laissant croire que par cette souillure il était en partie cause de la guerre. Car Périclès, l’homme le plus puissant de son temps, placé alors à la tête des affaires, était en toutes choses opposé aux Lacédémoniens, combattait leurs prétentions et excitait les Athéniens à la guerre[*](Les comiques athéniens ont attribué cette hostilité de Péricles contre les Lacédémoniens à mille motifs ridicules ; tantôt c’cst le désir de venger Aspasie, à qui les Mégariens ont volé deux servantes, tantôt le parti pris de tout brouiller pour ne pas rendre ses comptes. Il n’est pas difficile de trouver des raisons plus sérieuses. Périclès, en politique habile, avait compris qu’Athènes et Lacédémone ne pouvaient longtemps vivre en paix, et qu’il n’y aurait aucune sécurité pour Athènes tant que Sparte serait debout. Il a engagé la lutte au moment où Athènes était toute puissante ; et il eût vraisemblablement réussi, si sa mort, arrivée au début des hostilités, n’eût privé les Athéniens du seul homme qui sût dominer les orages populaires et allier à la science de la guerre et à une rare sagacité politique une fermeté inébranlable.).
CXXVIII. Les Athéniens, à leur tour, invitèrent les Lacédémoniens à expier le sacrilége de Ténare. Les Lacédémoniens avaient jadis arraché du temple de Neptune, à Ténare, les Hilotes suppliants, et les avaient massacrés. C’est même à cette cause qu’ils attribuèrent eux-mêmes le grand tremblement de terre de Sparte.
Ils les invitèrent aussi à expier leur sacrilège contre Pallas Chalcioeque[*]( Pallas au temple d’airain.). Voici en quoi il consistait : lorsque Pausanias, rappelé de son commandement dans l’Hellespont et mis en jugement, eut été absous, les Spartiates ne lui confièrent plus aucune mission au dehors ; mais lui-même prit, de son chef et sans l’aveu des Lacédémoniens, une trirème d’Hermione et retourna dans l’Hellespont. Le prétexte était la guerre que les Grecs faisaient sur ce point ; mais son véritable but était de reprendre les intrigues qu’il avait nouées avec le roi, dans le dessein de mettre la Grèce sous sa domination. Voici, du reste, le premier service qu’il avait rendu au roi et le commencement de toute cette affaire : lorsqu’il prit Byzance[*](Voy. Thucyd. i, 94.), à son premier voyage après son retour de Cypre, il avait fait prisonniers dans cette
CXXIX. Tel était le contenu de la lettre. Xerxès en fut charmé et députa vers la mer Artabaze, fils de Pharnace. Il lui ordonna de prendre le commandement de la satrapie de Dascylion, en remplacement de Mégabatès qui en était alors investi. En même temps il lui remit une réponse écrite, pour Pausanias, avec mission de l’expédier à Byzance au plus vite, de montrer à Pausanias le sceau royal, et, dans le cas où il ferait quelques ouvertures sur ses propres affaires, d’agir pour le mieux et en sujet dévoué. A son arrivée, Artabaze exécuta les ordres qu’il avait reçus, et envoya la lettre. Cette réponse était ainsi conçue :
« Ainsi parle le roi Xerxès à Pausanias : pour ce qui
CXXX. Après la réception de cette lettre, Pausanias, qui déjà jouissait d’une grande considération chez les Grecs pour avoir commandé à Platée, conçut encore plus d’orgueil, et ne voulut plus s’en tenir aux moeurs de son pays : il sortait de Byzance en costume médique ; lorsqu’il traversait la Thrace, des Mèdes et des Égyptiens l’escortaient, armés de lances ; sa table était servie à la manière persique ; déjà il ne pouvait plus contenir sa pensée, et, dans de petites choses, il trahis- sait les grands desseins dont il méditait l’accomplissement. Il ne se laissait aborder que difficilement, et se montrait, avec tout le monde sans exception, d’une humeur si intraitable, que personne ne pouvait plus paraître devant lui. Ce ne fut pas là un des moindres motifs qui déterminèrent les alliés à passer aux Athéniens.
CXXXI. Ces procédés motivèrent son rappel, quand [*]( Les rois de Perse faisaient inscrire dans les fastes de leur règne les noms de ceux qui leur avaient rendu quelque service.)
CXXXII. Personne à Sparte, ni parmi ses ennemis, ni dans le reste des citoyens, n’avait aucun indice certain qui pût autoriser à frapper un homme du sang royal et, de plus, revêtu alors de la plus haute dignité : car Plistarque, fils de Léonidas, roi de Sparte, trop jeune encore, était sous la tutelle de Pausanias, son
Les Lacédémoniens avaient sur-le-champ effacé cette inscription, pour faire graver sur le trépied le nom des villes qui avaient consacré ce monument de leur commune victoire sur les barbares[*](Suivant le scoliaste de Thucydide, ce trépied fut plus tard placé par les Romains sur l’hippodrome de Byzance.). Néanmoins on faisait de cela un crime à Pausanias, et, dans la situation où il se trouvait, on y trouvait bien plus d’analogie encore avec ses desseins du moment. Le bruit courait aussi qu’il avait des intelligences avec les Hilotes ; et cela était vrai : il leur avait promis la liberté et le rang de citoyens s’ils voulaient se soulever avec lui et seconder en tout ses desseins. Cependant ni ces griefs, ni les déclarations de quelques Hilotes, n’avaient paru aux Lacédémoniens mériter assez de créance pour qu’on innovât rien à son égard, et qu’on se départit de l’usage établi chez eux de ne jamais se hâter de prononcer,
CXXXIII. Ces lettres, communiquées par lui aux éphores, fortifièrent leur conviction. Toutefois ils voulurent entendre personnellement quelque aveu de la bouche de Pausanias ; d’après leurs instructions, cet homme se rendit en suppliant à Ténare[*](Dans le temple de Neptune, regardé comme un asyle inviolable.), s’y construisit une cabane séparée en deux par une clôture, et fit cacher dans l’intérieur quelques-uns des éphores. Pausanias vint à lui et lui demanda ses motifs pour se constituer suppliant : alors les éphores entendirent distinctement et les reproches de cet homme à Pausanias sur ce qu’il avait écrit à son sujet, et les détails circonstanciés qu’il lui donnait sur tout le reste ; comment il ne l’avait jamais compromis dans ses messages auprès du roi ; comment Pausanias l’avait cependant choisi pour le dévouer à la mort, à l’égal du commun de ses serviteurs. Ils entendirent également
CXXXIV. Après avoir tout entendu par eux-mêmes, Les éphores se retirèrent, et, désormais bien convaincus du crime, ils résolurent d’arrêter Pausanias dans la ville. On raconte qu’il allait être pris sur le chemin, mais que, voyant un des éphores s’avancer, il comprit à son air dans quel but il venait à lui ; sur un signe secret d’un autre éphore, qui l’avertit par bienveillance, il les prévint et courut se réfugier dans le temple de Pallas Chalcioeque. Ce temple était tout près ; il entra dans un petit réduit qui en dépendait, afin de ne point souffrir des intempéries de l’air, et s’y tint en repos. Les éphores, dans le premier moment, ne purent l’atteindre ; mais ensuite, l’ayant découvert dans ce réduit, ils enlevèrent le toit et les portes, l’y renfermèrent en murant les issues, et restèrent à l’assiéger par la faim. Lorsqu’ils s’aperçurent, à sa position dans le réduit, qu’il allait rendre le dernier soupir, ils le tirèrent du temple, respirant encore ; et il mourut aussitôt. On allait le jeter dans le Céada, où l’on précipite les criminels ; mais on se décida ensuite à l’ensevelir dans le voisinage. Plus tard, l’oracle de Delphes ordonna aux Lacédémoniens de transporter son tombeau au lieu où il était mort. (On le voit encore aujourd’hui sous les portiques en avant du temple, ainsi que l’indique une inscription gravée sur des colonnes.) L’oracle déclara aussi qu’il y avait sacrilège, et qu’ils eussent à donner à Pallas Chalcioeque deux corps au lieu d’un : les
CXXXV. Les Athéniens, se fondant sur la déclaration de sacrilége faite par le dieu, insistèrent de leur côté pour une expiation. Les Lacédémoniens envoyèrent des députés à Athènes accuser Thémistocle, comme coupable de médisme[*](Plutarque et Diodore admettent que Thémistocle connaissait en effet la trahison de Pausanias, mais avait refusé de s’y associer. Diodore ajoute que le but des Lacédémoniens, en accusant Thémistocle, était d’associer les Athéniens à la honte de cette trahison.), à l’égal de Pausanias. Ils avaient trouvé, disaient-ils, dans les pièces du procès de Pausanias, la preuve de sa culpabilité, et demandaient qu’il subît la même peine. Thémistocle, alors frappé d’ostracisme, vivait à Argos, et faisait des excursions dans le reste du Péloponnèse. Les Athéniens, cédant à ces réclamations, acceptèrent l’offre des Lacédémoniens de poursuivre Thémistocle de concert avec eux, et leur adjoignirent des commissaires, avec ordre de l’amener, quelque part qu’ils le trouvassent.
CXXXVI. Thémistocle, prévenu à temps, s’enfuit du Péloponnèse et se retira chez les Corcyréens qu’il avait obligés[*](Suivant le scoliaste, Thémistocle s’était opposé à ce qu’on chàtiât les cités qui n’avaient point pris part à la lutte contre les Perses ; de ce nombre étaient les Corcyréens.). Mais ceux-ci lui ayant observé qu’ils craignaient, en le gardant, de s’attirer l’inimitié des Péloponnésiens et des Athéniens, il se fit transporter par eux sur le continent en face de Corcyre. Toujours poursuivi par les commissaires envoyés sur ses traces, traqué par eux partout où il cherchait asile, il fut contraint, dans un moment de détresse, de se retirer chez
CXXXVII. Lorsque les Lacédémoniens et les Athéniens arrivèrent, peu de temps après, il refusa de le livrer, malgré leurs pressantes sollicitations[*](Et même malgré leurs menaces. (Voy. Diodore, xii, 56.)) ; et, sur le désir qu’exprima Thémistocle de se rendre auprès du roi de Perse, il le fit conduire par terre jusqu’à Pydna, ville d’Alexandre[*](Alexandre Philellène.), sur l’autre mer[*](Sur le golfe Thermaique, tandis que les États d’Admète étaient situés sur le golfe Pagasétique.). Il y trouva un bâtiment qui faisait voile pour l’Ionie, s’y embarqua et fut poussé par la tempête devant le camp des Athéniens
CXXXVIII. Le roi admira, dit-on, sa résolution, et l’engagea à y donner suite. Thémistocle, dans l’intervalle, apprit tout ce qu’il put de la langue des Perses et des usages du pays. Au bout d’un an, il se présenta devant le roi et reçut de lui plus d’honneurs et de puissance que n’en avait jamais obtenu aucun des Grecs[*](Plutarque et Diodore s’étendent longuement sur les honneurs qui lui furent accordés à la cour de Perse.). Il dut cette distinction à son illustration antérieure, à l’espérance qu’il faisait concevoir au roi de lui soumettre la Grèce, et surtout à la perspicacité dont il donna des preuves.
En effet, on remarquait chez Thémistocle une intelligence naturelle aussi sûre que puissante ; et, à cet égard, il méritait tout particulièrement l’admiration qu’inspire un homme supérieur. Une pénétration innée, que l’étude n’avait pas eu besoin de former, à laquelle l’étude n’avait rien ajouté, lui permettait de juger sai- nement, presque sans réflexion, les faits les plus imprévus, au moment même où ils se présentaient ; quant à l’avenir, il était rare que ses conjectures fussent démenties. Il avait une égale sûreté de coup d’oeil et pour traiter les questions dont il avait l’habitude, et pour saisir celles dont il n’avait point l’expérience. Pardessus tout il savait démêler à l’avance, au milieu des événements, ce qui était avantageux ou nuisible. En
Son tombeau est à Magnésie-d’Asie, sur la place publique ; car il était gouverneur de cette contrée, le roi lui ayant donné[*](Les historiens font constamment allusion à cet usage des Perses. Hérodote dit (i, 192) que quatre bourgs étaient attribués à l’entretien des chiens du roi.), pour le pain, Magnésie qui rapportait annuellement cinquante talents ; pour le vin Lampsaque, qu’on réputait le vignoble le plus fertile d’alors ; et Myonte[*](Ville de Carie.) pour la table. Ses parents assurent avoir rapporté, d’après ses ordres, ses restes dans l’Attique, sa patrie, et les y avoir ensevelis à l’insu des Athéniens ; car, ayant été banni pour trahison, il ne pouvait y être enseveli[*](Voici la loi : « Si quelqu'un est convaincu d’avoir trahi « l’État, ou dérobé les choses sacrées, qu’il ne soit point ense- « veli dans l’Attique, et que ses biens soient confisqués. »).
Ainsi finirent Pausanias de Lacédémone et Thémistocle d’Athènes, les deux hommes les plus illustres de la Grèce à cette époque.
CXXXIX. Telles furent, lors de la première ambassade, les injonctions que firent et reçurent les Lacédémoniens pour l’expulsion des sacriléges. Ils renouvelèrent plus tard leurs réclamations ; de plus, ils enjoignirent aux Athéniens de lever le siége de Potidée et de rendre à Égine son indépendance ; ils insistaient surtout, et d’une manière formelle, sur le retrait du décret qui interdisait
CXL. « Athéniens, mon opinion n’a pas changé : nous ne devons pas céder aux Péloponnésiens. L’ardeur avec laquelle on se détermine à la guerre ne
« Les dispositions hostiles des Lacédémoniens contre nous étaient évidentes auparavant ; elles le sont encore plus aujourd’hui. Car, bien que les traités portent que les différends réciproques seront réglés à l’amiable, chacun de nous restant provisoirement nanti de ce qu’il a entre les mains, ils n’ont jamais voulu ni réclamer l’arbitrage, ni l’accepter lorsque nous l’avons offert ; ils aiment mieux dans leurs réclamations en appeler aux armes qu’à la justice ; et déjà ce sont des ordres, ce ne sont plus des plaintes qu’ils vous apportent. Ils nous ordonnent de lever le siége de Potidée, de rendre l’indépendance à Égine, et de rapporter le décret contre les Mégariens. Enfin voilà leurs derniers députés qui viennent nous enjoindre de laisser la liberté à tous les Grecs. Ils proclament bien haut que, le décret[*](Contre les Mégariens.) rapporté, il n’y aura pas de guerre ; mais n’allez pas,