The six books of a common-weale

Jean Bodin

Bodin, Jean. Les six livres de la republique. Paris: Chez Iacques du Puys, Libraire iuré, à la Samaritaine, 1577.

Le Monarque Royal est celuy, qui se rend aussi obeissant aux loix de nature, comme il dsire les sugets estre enuers luys, laissant la liberté naturelle, & la proprieté des biens à chacun. I'ay adiousté ces derniers mots, pour la difference du Monarque seigneurial, qui peut estre iuste & vertueux Prince, & gouuerner ses sugets equitablement, demeurant neantmoins seigneur des personnes, & des biens. Et s'il aduient que le Monarcque seigneurial, ayant iustement conquesté le pays de ses ennemis, les remettre en liberté, & proprieté d'eux & de leurs biens de seigneur il deuient Roy, & change la Monarchie seigneuriale en royale. c'est pourquoy Pline le ieune disoit à Traian l'Empereur, "Princeps sedem obtines, ne sit domino locus." Ceste difference fut bien remarquee des anciens Perses, qui[*]( Herodot.) appelloient Cyrus l'aisné Roy, Cambyses seigneur, Darius marchant: par ce que l'vn s'estoit monstré Prince doux & debonnaire, l'autre hautain & superbe, le troisiesme trop exacteur & auare. Et mesmes Aristote auoit aduerti Alexandre le grand, se comporter enuers les Grecs, comme pere: & enuers les Barbares, comme seigneur: toutesfois Alexandre n'en fist rien, voulant que les Grecs fussent iugez à la vertu, & les Barbares aux vices: & que toute la terre fust vne cité, & son camp le donjon d'icelle. l'ay mis en nostre definition, que les sugets soient obeissans au Mornarque Royal, pour monstrer qu'en luy seul gist la majesté souueraine: & que le Roy doit obeir aux loix de nature, c'est à dire, gouuerner ses sugets, & guider ses actions par la iustice naturelle, qui se voit & fait cognoistre aussi claire & Iuisante que la splendeur du Soleil. c'est doncques la vraye marque de la monarchie Royale, quand le Prince se rend aussi doux, & ployable aux loix de nature, qu'il desire ses sugets luy estre obeissans: ce qu'il fera, s'il craint Dieu sur tout, s'il est pitoyable aux affligez, prudent aux entreprinses[*]( les vrayes marques d'vn grand Roy.) hardi aux exploits, modeste en prosperité, constant en aduersité, ferme en sa parole, sage en son conseil, soigneux des sugets, secourable aux amis terrible aux ennemis, courtois aux gens de bien, effroyable aux mechans, & iuste enuers tous. Si donc les sugets obeissent aux loix du Roy, & le Roy aux loix de nature, la loy d'vne part & d'autre sera maistresse, ou bien, comme dit Pindare, Royne. Car il s'en ensuyura vne amitié mutuelle du Roy enuers les sugets, & l'obeissance des sugets enuers le Roy, auec vne tres-plaisante, & douce harmonie des vns auecc les autres & de tous auec le Roy. c'est pourquoy ceste Monarchie se doibt appeller royale & legitime: soit que le Roy vienne à l'estat par droit successif, comme tous les anciens Roys, ainsi que Thucydide a tresbien remarqué: soit que le royaume soit deferé par vertu de la loy, sans auoir esgard aux filles,

206
ny aux masles descendans d'icelles, comme il se fait en ce royaume par la loy Salique: soit que le Roy vienne par election, comme Aristote escrit qu'il se faisoit aux temps heroïques (en quoy toutesfois il est contraire à Thucydide, & à la verité des histoires) & se fait en plusieurs royaumes du pays Septentrional: soit qu'il fust donnè en pur don, comme fist Auguste à Iuba le ieune, le faisant d'esclaue Roy de Numidie, qui auoit esté reduitte par Caesar en forme de prouince, sugete à l'empire Romain, ou bien comme le royaume de Naples, & de Sicile fut donne à Charles de France, & depuis encores à Loys de France premier Duc d'Anjou: ou qu'il soit laissé par testament, ainsi que les Roys de Thunes, Fez, & Maroc ont accoustumé: comme il fut aussi pratiqué par Henri VIII. Roy d'Angleterre, qui laissa le royaume à son fils Edouart: & à luy substitua Marie, & à celle-cy Elizabet: qui depuis fut Royne, ioint que le testament fut confirmé, & ratifié par le peuple: soit que le Roy empiete l'estat par finesses, & ruzes, pourueu qu'il regne iustement, comme Cecrops, Hieron, Gelon, Pisistrate, qui vserent tres-sagement de leur puissance, ainsi que dit[*]( In libro de Sera numinis vindicta.) Plutarque: & de nostre aage Cosme de Medicis: ou que par sort le royaume se doit deferé, comme à Darius, l'vn des sept seigneurs de Persé, qui fut Roy, par ce que son cheual auit henni le premier, ainsi qu'il estoit conuenu, apres qu'on eust tué les Mages, qui auoient occupé le royaume: soit que le Prince conqueste le royaume par force, & par armes, à droit ou à tort, pourueu qu'il gouuerne equitablement le royaume par luy conquesté: comme dit Tite Liue du Roy Seruius, "Neque enime praeter vim quicquam ad ius regni habebat:" & toutesfois il fut bon Roy. aussi souuent on a veu d'vn voleur & brigand, se faire vn Prince vertueux: & d'vne turannie violente, se former vne iuse royauté: soit qu'on elise le Roy pour sa noblesse, comme fut Campson Roy de la Caramanie, eleu pour Sultan d'Aegypte par les Mammelucs: & Charles de France frere de sainct Loys, que le Pape enuoya aux Florentins, qui demandoient vn Prince de sang royal: & les Vicomtes Danglerie pour leur noblesse furent eleus seigneurs de Milan, ores qu'ils fussent estrangers: soit que le Prince fust eleu pour sa noblesse, & iustice comme Numa: ou pour sa vieillesse, comme les anciens Arabes elisoient le plus vieil, dit Diodore, & les Taprobanes, comme dit PLine: ou pour sa force, comme Maximin: ou pour sa beauté, comme Heliogabale: ou pour sa grandeur, comme on faisoit en Ethiopie: ou pourmieux boire, comme en Scythie, dit Aristote. Ie laisse la definition du Roy baillee par[*]( lib.3.de Repub.) Aristote. car il dit, que le Roy est celuy qui est eleu, & qui commande au desire des sugets. en autre lieu il dit, que le Roy deuient tyran pour peu qu'il commande contre le vouloir des sugets. Telles definitions ne sont pas seulement sans fondement, ains aussie pernicieuses. Qu'elles soient faulses il appert, d'autant que le tiltre royal, qui emporte la majesté & puissance souueraine, comme nous auons monstré, seroit incompatible auec icelle: attendu
207
que le Roy n'auriot puissance de donner loy aux sugets, ains au contraire il seroit contraint par eux de receuoir la loy: & les plus iustes Princes du monde seroient tyrans: & qui plus est, il ne se trouueroirt pas vn seul Roy: & pour le trancher court, le Roy ne seroit que simple Magistrat. Qui sont toutes choses impossibles, & aussi impertinentes, comme ce que dit le mesme Aristote, que les peuples sont barbares, où les Roys viennent par succession: veu que son Roy mesmes Alexandre le grand estoit de ceux-la descendu en droicte ligne du sang de [*]( Plutar.in Alex.141.) Hercules, & par droict successif paruenu à la couronne do Macedoine: comme aussi tous les Roys de Sparte. Il faudroit confesser que tous les Roys d'Asie & d'Aegypte fussent barbares, desquels neantmoins, il est[*]( Cicero epist. 1. ad Q. Frattem. Theodoretus episcop. Cyren. de Græcarum affectionum curatione. Iosip. contra Appionem.) bien certain que l'humanité, la courtoisie, la doctine, les belles sciences, & la source des loix, & des Republiques sont issues:& n'y auroit qu'Aristote, & vne poignee de Grecs qui ne fussent barbares. Nous monstrerons euidemment en son lieu, qu'il n'y a rien plus dangereux à vn estat, que de mettre les Roys en election. Combien que Aristote[*]( lib.3. de Repub. cap. 3.) s'est aussi mespris, où il dit qu'il y a quatre sortes de Roys: & neantmoins par son discours, il s'en trouue cinq de compte fait. Le premier qu'il dit volontaire, comme estoient les anciens Roys des temps heroïques, faisans l'estat de iuges, de capitaines, & de sacrificateurs. Le second, dit-il, est propre aux peuples barbares, où le Roy vient par droict successif.[*]( Opinion de Aristote, touchant les Roys.) Le troisiesme se fait par election. Le quatriesme est propre aux Lacedemoniens, d'estre Capitaine en chef, par succession de pere en fils. Le cinquiesme est Seigneurial, comme le chef de maison est Seigneur de ses esclaues, & de leurs biens. Voila ce qu'il dit. Quant à la premiere sorte de Roys, nous trouuons bien qu'ils faisoient l'office de iuges, de capitaines, & de sacrificateurs: mais il ne s'en trouue pas vn volontaire, auparauant Pittacus Roy de Corinthe, & Timondas Roy de Negrepont. ains au contraire Plutarque[*]( Plutar. in Theseo.) dit, que les premiers seigneurs n'auoient autre poinct d'honneur deuant les yeux, que de forcer les hommes, 7 les tenir en sugetion comme esclaues: ce que l'escriture Saincte nous certifie du premier Monarque seigneurial Nemrod: laissans la principauté à leurs enfans par droict successif: comme dit Thucydide.ce qui est tres-bien verifié par la suitte de grand nombre de Roys de Assyriens, Medois, Persans, Indois, Aegyptiens, Hebrieux, Grecs, & Latins: qui suffist pour conuaincre d'erreur l'opinion d'Aristote. Quant à ce qu'il appelle Roys ceux de Lacedemonne, par ce qu'ils estoient capitaines en chef hereditaires: i'ay monstré cy dessus, que la puis-
208
-sance royal est inseparable de la majesté: & que les Roys de Lacedemonne n'estoient que simples Senateurs, sugets à la seigneurie, & aux moindres magistrats. ioint aussi qu'ils n'estoient point capitaines en chef par droit successif. car souuent la Seigneurie donnoit ceste charge aux autres citoyens, comme à Lysandre, Gillippe, Callicratidas: qui ont eu charges de capitaines en chef, & les Roys deboutez & combien qu'Agesilaus fust l'vn des Roys, si est-ce qu'il n'osa prendre la charge de Capitaine en chef que la Seigneurie ne l'eust commandé, ainsi que dit Plutarque en sa vie. Et quand bien ils eussent esté capitaines en chef, cela n'emporte point la puissance royale: non plus que les capitaines en chef des Acheans, qui venoient par election attendu qu'ils estoient sugets aux estats des Acheans, qui les punissoient: comme ils firent Damocritus Capitaine en chef, qu'ils condamnerent à trente mil escus d'amende, comme nous lisons en Pausanias: ainsi les Ephores condamnoient les Roys à l'ammende, & quelquefois à perdre la vie, comme nous auons dit cy dessus. Il ne faut doncques pas mettre ceux-cy au rang des Roys: non plus que celuy qui est Monarque Seigneurial, seigneur des personnes, & des biens, troisiesme sorte de Roys, qu'il dit estre par election, cela ne fait aucune difference des Roys non plus que la seconde qu'il dit estre par succession: autrement il deuoit par mesme moyen, metttre vne sixiesme espece de Roys, qui se font par sort: comme fut Darius le premier: & vne septiesme par donation, & 'l'huictiesme par testament: & la neufiesme par ruses, & finesse: & la dixiesme par force: & conseuqemment des autres en cas pareil, qui seroit faire vne infinité de sortes de Roys: lesquels neantmoins tous sont compris en vne espece. Car la difference des Monarques, ne se doibt pas prendre par le moyen de paruenir à l'estat, ains par le moyen du gouuernement: qui est compris en trois sortes, à scauoir Seigneurial, Royal, & Tyrannique. Mais quant à la troisiesme sorte de Roys, qu'Aristote a posé, & exemplifié pour resablir l'estat, mettre tout en ordre, corriger les coustumes, & puis quitter sa charge: il n'y a point d'apparence d'appeller ceux là Roys, qui ne sont rien autre chose que simples commissaires: comme les Dictateurs en Rome, ausquels Denys[*]( lib.2.) d'Halicarnas, compare les Arques en la Republique des Thessaliens, les Cosmes en Lacedemonne, les Aesymnetes en Mitylene: qui auoient pareille charge que la baillie de Florence, lors que la Republique estoit populaire: c'est à sçauoir, que le grand conseil du peuple elisoit huict, ou dix personnages de mieux entendus aux affaires, pour restablir l'estat, & remettre en ordre ce qui par succession de temps estoit venu en desordre, pour les bourses, & creation d'officiers: & cela fait ils se despoüilloient de leur charge: tout ainsi que les dix commis-
209
-saires qui furent éleus en Rome pour corriger les coustumes, qu'il faudroit par ce moyen, au dire d'Aristote, appeller aussi Roys: chose qui seroit absurde: car la qualité de Magistrat, & moins encores de commissaire, n'a rien de commun auecques la majesté souueraine d'vn Roy. aussi le nom de Roy ne peut conuenir sinon à celuy qui est absolument souuerain. & combien que Cæsar en ses memoires dit, que les habitans d'Authun elisoient tous les ans vn magistrat auec puissance royale, si est-ce toutesfois que cela se dit improprement. Et qui plus est les gouuerneurs des pays, & prouinces conquestees par Alexandre le grand, ores qu'apres sa mort ils fussent souuerains, si est-ce qu'ils furent bien fort long temps, qu'ils n'osoient s'appeller [*]( Plutar. in Demetrio.) Roys. & le premeir qui commença fut Antigonus, apres la victoire qu'il obtint contre Ptolemee premier du nom: alors il print le Diadesme, ou bendeau royal, & meit en ses tiltres le nom de Greek Text, c'est à dire Roy. & tost apres les AEgyptiens appellerent aussi Ptolemee Roy: & par ialousie les prouinces de la haulte Asie, & les Thraces appellerent Seleucus & Lisymachus Roys. Et sans aller si loing, les anciens Roys de Lorraine, & de Bourgongne, deslors qu'ils rendirent la foy, & hommage aux Empereurs d'Alemagne, perdirent la qualité de Roys, & s'appellerent Ducs. nous auons monstré cy dessus, que celuy qui tient en foy, & hommage aux Empereurs d'Alemage, perdirent la qualité de Roys, & s'appellerent Ducs. Nous auons monstré cy dessus, que celuy qui tient en foy, & hommage d'autruy, ne peut estre Roy ny souuerain: comme dit vn Poëte, "Qui rex est, Regem Maxime non habeat." Car le nom de Roy, a tousiouurs esté auguste, & le plus honorable que le Prince souuerain puisse auoir. & pour ceste cause l'habit, les marques, les signes des Roys, ont tousiours esté particuliers, & non communiquez: comme anciennement le bendeau royal, & le sceptre. & n'y eut chose qui rendit la majesté des Roys de Rome tant venerable, que les aornemens royaux, que Tarquin le prisque apporta des anciens roys d'Hetrurie, comme nous lisons és histoires. Et mesmes les Romains, quoy qu'ils eussent changé la puissance royale en populaire: si est-ce que le Senat Romain, auoit accoustumé d'enuoier aux roys les marques royales, à sçauoir le Diadesme, ou la couronne d'or, la coupe d'or, le sceptre d'yuoir, & quelquesfois la robbe de pourpre brochee d'or, & la selle d'yuoire, & ainsi que nous lisons és[*]( Tacit. lib.2. & 4. Appianus, Liuius Valer.Max.) historiens. Et au registre du Pape Gregoire septiesme, on list que Demetrius fut establi Roy de Croatie, & Sclauonie par le sceptre, la couronne, & la banniere. Les Papes, & Empereurs ont souuent distribué ces beaux tiltres de roys, ores qu'ils n'eussent aucun pouuoir de ce faire: non plus que l'Empereur Anastase qui enuoya les aornemens Consulaires, & le tiltre d'Auguste au Roy de France Clouis, qui les receut en la ville de Tours, comme dit Hermon. & Iustinian qui donna le tiltre de Patrice au Roy Childebert: non pas qu'il voulust fair plus Roy qu'il estoit, mais il donna son ordre à vn grand Roy: aisi que font les roys à present les vns aux autres.
210
Aussi l'Empereur Frideric I. enuoya à Pierte seigneur de Dannemarc l'espee & la couronne, auec la qualité de Roy: qualité qui estoit contraire à l'effect, attendu qu'il se rendit[*]( Tritemius cap.17.) vassal de l'empire, & fist la foy, & hommage à l'Empereur du royaume de Dannemarc, promettant, & obligeant tant luy, que ses successeurs, de tenir le royaume de l'Empire: mais cest qualité fist preiudice à l'Empire: car peu à peu ils se sont exemptez de la sugetion de l'Empire. Et d'autant que le Duc d'Austriche, estant aussi appellé Roy par le mesme Frideric, (sans preiudice des droits de l'empire, foy, & hommage, ressort, & souueraineté) & qu'il voulut aussi trancher du souuerain, refusant obeir aux estas de l'Empire, douze ans apres fut priué de la qualité, & tiltre royal. Et pour mesme faute que fist Henry Roy d'Angleterre, fils de Guillaume le conquerant, de faire couronner, & appeller Roy d'Angleterre de son viuant, son fils aisné Henry: tost apres le fils voulut s'esgaler au pere, maier les affaires, de sorte que le pere & le fils entrerent en querelles, & factions, qui sans doubte auoient ruiné l'estat, si le fils ne fust mort le premier. Il s'est bien veu en ce royaume, au commencement du regne de Capet, que pour asseurer l'estat à son fils Robert, & Robert à Henry, & cestui-ci à Philippe, les faisoient couronner, & appeller Roys: comme en cas pareil Changuis, premier Roy de Tartarie, éleu par les sugets, fist couronner Hocota son fils aisné de son viuant. mais cela est de perilleuse suitte, si le nouueau Roy n'est pourueu d'vn royaume: comme fist Seleucus, lequel ayant fait couronner, & appeller Roy son fils Antioque, par mesme moyen le pourueut aussi du royaume de la haute[*]( Plutar. in Demetrio.) Asie. ou bien que le royaume soit electif: comme sont ceux de Pologne, Dannemarc, Suede, où les Roys de leur viuant font elire leurs enfans, ou ceux qu'ils veulent auoir pour successeurs: & font que les princes & seigneurs du pays, leur prestent le serment de fidelité: comme Gostaue Roy de Suede, ayant empieté l'estat sus les Roys de Dannemarc, fist elire Henry son fils: & Frideric, à present Roy de Dannemarc, fut éleu Roy l'an M.D.LVI. deux ans auparauant la mort du pere, lequel doubtant que ses oncles Iean, & Adolphe, voulussent pratiquer apres sa mort, vne nouuelle election, pria le Roy, par M. Danzai ambassadeur de France, & puis y enuoya ambassadeur expres pour y tenir la main, & le receuoir en sa protection. Ainsi faisoient, & font encores en partie, les Roys de Maroc, de Fez, de Tunes, comme nous lisons en Leon d'Afrique: & de nostre memoire Ferdinand d'Austriche fist elire de son viuant & couronner Maximilian Roy d'Hongrie, & de Boheme: & depuis peu de temps, Maximilian a fait le semblable à son fils Ernest. Sigismond Auguste voulut bien aussi nommer vn successeur Roy de Polongne, mais il fut empesché par les estats: car combien que ce soit le plus seur moyen, pour euiter aux seditions: si est ce qu'il est à craindre que le droict d'election passe en force de succession: ainsi qu'on a veu l'empire en la maison d'Austriche continuer par vne
211
longue suitte de telles preuentions. & le royaume de Nouergue fait hereditaire, voire suget à la succession des femmes: & pour ceste cause pretendu par la douairiere de Lorraine, & la Comtesse Palatin, filles de Cristierne Roy de Dannemarc, qui ont remonstré, que Marguerite de Wolmar par droit successif fut Royne des trois royaumes, Noruergue, Suede, & Dannemarc. Voila quant à la monarchie royale. disons de la troisiéme, qui est la monarchie tyrannique.